Le profil idéal de dirigeant de PME et d’ETI
5 novembre 2024
Une question revient souvent dans la bouche de nos clients, qu’ils soient eux-mêmes dirigeants à la recherche de leur successeur ou bien encore d’un Directeur Général ou d’un investisseur en capital :
Quel est le profil idéal du dirigeant de PME et d’ETI ?
La réalité est que le profil idéal n’existe pas.
Axer la réflexion sur une liste de compétences et aptitudes-clés standardisée est voué à passer à côté du cœur de la solution : une étude approfondie et poussée du contexte dans lequel le profil va s’inscrire !
« Le regard moderne sait voir la gamme infinie des nuances. »
(Maupassant)
Tout en s’appuyant sur les caractéristiques indispensables à l’exercice du leadership, celles-ci sont dimensionnées, évaluées et mises en réponse à l’environnement de l’entreprise, sa situation et son avenir.
Certes, le rôle d’un dirigeant est à la fois stratégique et opérationnel ; il doit faire preuve d’une vision à long terme tout en assurant le bon fonctionnement quotidien de l’entreprise et être en capacité, avec son équipe, d’assurer le présent et de construire le futur. Mais de quel présent parle-t-on ? Quels sont les enjeux qui vont se présenter dans le futur et challenger une performance durable ?
De l’appréhension de la complexité… à la capacité à simplifier
Dans son œuvre sur la « pensée complexe », Edgar Morin nous rappelle que la réalité ne peut être simplifiée à une série de causes et d’effets isolés. Oui, un dirigeant de PME ou d’ETI doit être capable de gérer un système d’interactions et d’interdépendances… car les décisions qu’il prend dans un domaine -finances, ressources humaines, ou stratégie commerciale – affectent tous les autres aspects de l’entreprise.
Cette « vision systémique » est fondamentale pour anticiper les évolutions du marché, intégrer les différents enjeux internes et externes, et naviguer avec succès dans un environnement volatil. Il doit être capable d’aller dans le détail, interpréter les signaux faibles et les ramener à une vision d’ensemble ; synthétiser et parfois… simplifier.
« La capacité de simplifier veut dire éliminer ce qui est superflu pour que ce qui est nécessaire puisse retenir l’attention. » (Hans Hoffman)
Il s’agit d’un état d’esprit et d’un entraînement, car simplifier demande de choisir et donc de renoncer à certaines choses.
Toute la question sera donc : dans cet environnement précis et à ce moment de vie de l’entreprise, comment le dirigeant dosera entre pensée critique fine et le sens des priorités selon le temps et les ressources qu’il a à disposition ?
Le leadership : au cœur de la mobilisation des ressources humaines
La légitimité du dirigeant s’enracine désormais dans la proximité avec ses collaborateurs, de sa capacité à incarner une vision et de son aptitude à créer un environnement de confiance. Dès lors, il obtient une performance supérieure de la part de ses équipes (Waldman et Yammarino – 1999).
Mobiliser et inspirer… Mais quelles équipes ?
Un profil dirigeant expansif, passionné, haut en couleur mobilisera une équipe en résonnance avec ces caractéristiques. En revanche, dans un contexte où l’équipe est fragilisée, voire méfiante, ayant besoin d’être réassurée, ne sera-t-il pas un éléphant dans un magasin de porcelaine ? A ce stade-là, s’il doit d’adapter, il sera alors à son tour en contrainte. Dès lors, le profil idéal sera plutôt celui du dirigeant calme, mesuré…
Le profil du dirigeant dépend alors de la situation humaine qu’il va trouver en interne. On peut alors étendre la question à l’environnement extérieur de l’entreprise, et sa capacité à mobiliser… en externe ! Entraîner, susciter l’engouement de la part de ses partenaires économiques mais aussi de ses clients !
Qu’en est-il de sa capacité à mobiliser ses propres forces au moment adéquat ? La bonne idée ne suffisant pas, on se penchera alors sur sa capacité d’implémentation, dans des contraintes de temps et d’espace (le fameux Coût, Qualité, Délai).
L’optimisme (de combat) : un moteur… systématique ?
Michel Serres, à travers ses travaux sur la philosophie de l’optimisme, met en avant un concept particulièrement intéressant pour les dirigeants de PME et d’ETI : « l’optimisme de combat ». Cet optimisme de combat ne se résume pas à une attitude positive, mais implique un engagement actif à expérimenter, innover, et persévérer face aux obstacles.
Une étude de Harvard Business Review (2020) va dans son sens. Elle a démontré que les dirigeants les plus performants face à la crise du Covid-19 étaient ceux qui avaient su maintenir une attitude optimiste tout en prenant des mesures concrètes pour adapter leur modèle d’affaires.
Néanmoins, on se donne ici un exemple rencontré dans notre pratique ; un profil dirigeant, « idéal » en tous points, évoluant dans un secteur en souffrance vis-à-vis de l’opinion publique (scandales d’ordre éthique, sanitaire, etc.), adoptant avec ses investisseurs une posture enthousiaste, voire, allant à l’encontre des signaux d’alerte du marché… et ne réalisant pas le chiffre attendu, y sacrifiant son poste. Finalement, pêchant par optimisme !
On en revient au besoin de finesse d’analysé : l’optimisme, certes, mais aussi sachant lire les signaux et adapter sa réponse à l’obstacle peut-être parfois de manière… pessimiste !
La prise de décision dans un contexte de complexité et de risques
Les dirigeants de PME/ETI doivent parfois prendre des décisions complexes dans un environnement souvent incertain et ce, rapidement. Une étude de McKinsey (2021) montre que cette aptitude à décider, tout en intégrant des variables multiples (marché, finance, relations humaines), est gage des meilleures gestions de crises et de croissance.
Certes ! Mais peut-on systématiser ces qualités de manière rationnelle ? Le dirigeant choisi va-t-il se poser les questions suivantes : d’où venons-nous ? Quelles valeurs portons-nous ? Quelle est la maturité de notre organisation ? Quel est notre projet ? A quel horizon ? Qu’implique-t-il en termes de capacités ? L’équipe de direction actuelle peut-elle à porter ce projet ? Quel est l’état de notre marché ?…
Cette individualisation de la décision est illustrée dans l’essai La psychologie de l’argent (Morgan Housel, Financial Times). Un individu ayant connu un krach boursier, des périodes de récessions, n’aura pas la même perception et la même gestion de ses finances qu’une personne ayant vécu une relative période de sécurité… Le père, la mère de foyer, prendra-t-il ou elle les mêmes risques qu’une personne all-in ?
Le profil du dirigeant dépend de la temporalité des décisions mais aussi de sa résonnance personnelle avec la période traversée. Tant au niveau des crises que de l’audace de saisir les opportunités.
Finalement, le profil de dirigeant idéal est surtout une question d’adéquation, d’adéquation aux réalités de l’entreprise !
Autrement dit, avant de partir en chasse, il convient de prendre le temps d’analyser et de formaliser le profil recherché sans minimiser la complexité d’un tel exercice, et ce, dans un environnement mouvant et par nature… nuancé.