Journal confiné – Jour 23 : Un temps à sonder des âmes

Billets d'humeur

8 avril 2020

Par Stephane Chekroun – Associé chez Selescope
Mercredi 8 avril 2020

Un temps à sonder des âmes…

Je peux depuis ces derniers jours m’investir dans un projet qui me passionne. Une vraie chance !

C’est un petit laboratoire pharmaceutique (50 personnes en France). Il y a plusieurs mois, ses dirigeants se sont lancés dans une nécessaire remise en cause de leur stratégie, jusqu’aux fondements. Une période d’ouverture donc, de déstabilisation aussi, forcément. Puis ce fut le séisme de la crise sanitaire. C’est l’édifice économique mondial qui vacille. Le temps suspendu… mais pas perdu. Nos courageux dirigeants ont voulu profiter de ce moratoire pour avancer, pour approfondir leur démarche, pour l’enraciner dans leur équipe.

Ils m’ont demandé pour cela de mener une enquête auprès de l’ensemble de leur personnel. Pour ausculter l’état des troupes. Puis définir les actions utiles pour fédérer l’équipe, pour la mobiliser autour d’une ambition partagée, d’un projet collectif. Une fière façon de ne pas subir la frilosité de ces temps incertains.

Je multiplie donc les interviews. Les dirigeants de ce laboratoire ne transigent pas. Tous doivent avoir la possibilité de s’exprimer. Aucun point de vue n’est à négliger. De fait, les personnes interrogées se montrent plus que disponibles, ravies. Elles disposent de beaucoup de temps…

De quoi parle-t-on au juste ? De tout. De motivation, de sentiment d’appartenance, de fierté, de qualité de vie au travail, d’efficacité, de reconnaissance (matérielle ou non), de management, de l’adhésion aux nouvelles orientations de l’entreprise, de confiance dans l’avenir, de scepticisme et de foi… Les entretiens sont peu directifs. Il y a les bavards et les taiseux. Ceux qui disent ce qu’ils pensent et ceux qui disent ce qu’ils vivent, ceux qui critiquent et ceux qui font des propositions, ceux qui analysent et ceux qui se confient… Même les silences sont éloquents… généreux ! Et c’est toute l’humanité d’une équipe qui m’est offerte en partage dans ces temps de disette, de distanciation sociale…

À chaque entretien, la même progression. Au fil des minutes, quelque chose se livre, de plus en plus personnel, authentique, chaleureux ou intelligent. Chaque entretien est un cheminement. Ça en devient une évidence. Donner la parole, attacher de l’importance à la parole de chacun, c’est déjà agir, c’est souffler sur les braises, ranimer la flamme… c’est raviver les ardeurs. Ça en devient une évidence. Ces entretiens ne font pas que cartographier le climat social, ils le transforment, ils le revitalisent…

Et d’entretien en entretien, se révèle une image plus piquée de cette équipe. Elle m’apparaît dans son ensemble confiante et enthousiaste. Elle peut sembler en veille. Mais c’est une veillée d’armes. Ils livreront combat.

Être en veille, après tout, ce n’est pas dormir. Veiller dans la nuit, c’est lutter, lutter contre l’engourdissement, contre l’ensommeillement… c’est garder la lampe allumée.

Je veux ici saluer ces dirigeants courageux et intelligents, indociles, vent debout contre l’air du temps. Surtout, je veux ici saluer les âmes fières de ces femmes et de ces hommes, tous les saluer, tout l’équipage, du commandant de bord au moussaillon… honorer la vaillance de l’esquif dans les tumultes.

 

 

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